Allemagne : Retour des salariés en télétravail au bureau possible
Le Tribunal supérieur du travail (Landesarbeitsgericht) de Munich a récemment jugé qu'un employeur ayant autorisé son salarié à télétravailler peut exiger son retour dans les locaux pour des raisons opérationnelles impérieuses empêchant la poursuite de l’activité depuis le domicile.
Dans la présente affaire (dossier n° 3 SaGa 13/21, arrêt non encore publié), le salarié était employé à plein temps en tant que graphiste. Depuis décembre 2020, la grande majorité des salariés de l’entreprise, travaillant habituellement dans les locaux de cette dernière, se trouvaient en télétravail.
Environ trois mois plus tard, en février 2021, l’employeur avait ordonné au graphiste la reprise de son travail dans les locaux de la société. Le salarié s’y opposant, avait saisi le tribunal de première instance afin d’obtenir l’autorisation de rester en télétravail et de ne revenir qu’exceptionnellement sur le site.
En première instance, les juges ont rejeté la demande du salarié au motif qu'un droit au télétravail ne découlait ni du contrat de travail, ni de la version du règlement relatif à la santé et la sécurité au travail pendant la pandémie (« Corona-SchutzVO »). L'article 2 (4) de la Corona-SchutzVO en question prévoyait, dans sa formulation de l’époque, que les employeurs étaient tenus de proposer le télétravail à leurs salariés effectuant un travail de bureau ou une activité comparable dès lors qu’il n’existait pas de raisons opérationnelles impérieuses nécessitant une présence dans les locaux. Les juges de première instance ont rappelé que cette disposition n’entravait pas le pouvoir de direction de l’employeur que celui-ci pouvait exercer dans le respect des principes d’équité.
En l’espèce, l’employeur avait justifié la nécessité d’un retour en présentiel au motif que le salarié n’était pas aussi bien équipé à son domicile que dans les locaux pour effectuer correctement ses tâches et que le salarié n’avait pas pu démontrer que les données sensibles qu’il était amené à traiter étaient suffisamment protégées contre un accès de tiers, notamment de son épouse qui exerçait une activité concurrente.
Ces aspects ont été essentiels pour l'appréciation du Tribunal qui en a conclu que l'employeur avait respecté les principes d'équité en imposant le retour du salarié au site et que, par ailleurs, le risque général d'infection durant les trajets ainsi que sur le lieu de travail pendant la pause déjeuner ne s’opposant pas à l’obligation de revenir au bureau.
En confirmant cette décision, le Landesarbeitsgericht de Munich rappelle que le pouvoir de direction de l’employeur lui permet de définir unilatéralement un nouveau lieu de travail sous réserve que la situation contractuelle ne l’en empêche pas et qu’il respecte les principes d’équité.
Recommandation pratique :
La situation de télétravail qui s’est imposée pour une grande majorité des entreprises au cours des derniers mois est donc réversible sans qu’il soit nécessaire d’attendre la fin de la pandémie si les circonstances le justifient et si les dispositions contractuelles ne s’y opposent pas.
Veillez à ne pas limiter votre pouvoir décisionnels par une clause contractuelle mal formulée ou trop détaillée qui vous contraindrait à recueillir l’accord du salarié en cas de changement.
06.09.2021