Allemagne : Violation de données à caractère personnel et indemnisation du préjudice moral
Le Tribunal du travail de Neuruppin1 a considéré que le fait pour une entreprise de continuer à mentionner le nom d’une ancienne salariée sur son site web constitue une violation des dispositions relatives à la protection des données à caractère personnel et justifie le versement de dommages et intérêts à hauteur de 1.000 euros.
La plaignante occupait un poste d'employée de bureau dans une entreprise spécialisée dans la construction et le nettoyage d'étangs. Sur son site web, ladite entreprise indiquait à tort que la plaignante travaillait en tant que biologiste et qu'elle rédigeait notamment des protocoles d'analyse de l'eau. Elle n'avait en réalité jamais exercé ces activités.
Après la fin de son contrat de travail, la plaignante a demandé à ce que ses données à caractère personnel soient supprimées (et plus précisément en l’occurrence à ce que son nom soit retiré du site web de la société). Son ancien employeur n'ayant pas réagi, la plaignante réitéra sa demande de suppression de ses données à caractère personnel et réclama une indemnisation de 8 000 EUR pour l'utilisation non autorisée de son nom sur le site web.
L'entreprise a versé à la plaignante une indemnité de 150 euros et a indiqué que la suppression de son nom avait déjà été effectuée sur la nouvelle version du site web. La plaignante a alors saisi le tribunal du travail de Neuruppin d'une demande de dommages et intérêts d'un montant de 5 000 euros.
Indemnisation du préjudice moral au titre de l’article 82 du RGPD
Dans sa décision du 14 décembre 2021, le tribunal du travail de Neuruppin confirme l'existence d'un traitement illicite des données à caractère personnel portant atteinte aux droits de la personnalité de la plaignante. En application de l’article 82 du RGPD, les juges allemands accordent à l'ancienne employée 1 000 euros de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.
Le tribunal rappelle que toute atteinte aux droits de la personnalité ne donne pas droit à une indemnisation. La personne concernée doit démontrer qu’elle a effectivement subi un préjudice du fait de la violation des dispositions du RGPD par le responsable de traitement.
En l'espèce, le tribunal du travail a estimé que le préjudice résultait du fait que l'employeur aurait dû supprimer de sa propre initiative le nom de l’ancienne salariée du site web après la fin de la relation de travail. Les juges allemands prennent notamment en compte le fait que la société avait indiqué à tort que la plaignante était biologiste.
Enfin, en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts auxquels la plaignante a droit, le tribunal rappelle que l’indemnisation du préjudice subi doit être intégrale. Les juges tiennent également compte du caractère effectif et dissuasif de cette indemnisation.
Conseils pratiques
Comment éviter ce genre de décision ? Quelles sont les règles à respecter en ce qui concerne le traitement de données à caractère personnel des anciens salariés ?
- Tout d'abord, la société n’aurait pas dû publier de fausses informations sur ses employés sur son site web. Ceci constitue une violation du principe selon lequel les données à caractère personnel doivent exactes (Art. 5, par. 1, point d du RGPD) .
- Ensuite, lorsque la relation de travail a pris fin, la société aurait dû mettre à jour le site web et supprimer de sa propre initiative les informations relatives à son ancienne employée. Pour ce faire, il aurait été préférable que l'entreprise mette en place une procédure interne afin de définir la manière dont les données des anciens employés doivent être traitées.
- Enfin, lorsque l'ancienne employée a demandé la suppression de son nom sur le site web, la société aurait dû faire droit à cette demande. La mise en place d'une procédure interne permettant de traiter efficacement les demandes d'exercice des droits des personnes concernées est absolument essentielle pour toute organisation.
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1 Tribunal du travail de Neuruppin, jugement du 14 décembre 2021, Az. 2 Ca. 554/21.
25.05.2022