Rupture d'une lettre de confort
En droit allemand, la société mère peut rompre une lettre d'intention même en période de crise de la filiale s'il s'avère que les parties ont convenu d'un droit de résiliation
Le demandeur est administrateur judiciaire de la société STAR 21 GmbH & Co. KG, la défenderesse est associée directe de la KG.
L' administrateur judiciaire a introduit une action en dommages et intérêts à l'encontre de la défenderesse en raison de la rupture de la lettre de confort. Fin 2001, le bilan commercial de la KG faisait apparaître un surendettement, aucune réserve cachée n'ayant été constatée. A cet égard, la KG et la défenderesse ont conclu une convention intitulée "lettre de confort " au début du mois de février 2002.
Au titre de cette convention, la défenderesse s'engageait, en cas d'insolvabilité ou de surendettement de la KG, à acquitter les dettes de cette société dès leur échéance de manière à mettre un terme à son surendettement ou éviter son insolvabilité. Le 11.11.2002, la défenderesse a rompu la lettre d'intention.
La Cour d'appel a fait droit à la demande de l'administrateur judiciaire selon l'argument que la défenderesse n'avait pas le droit de rompre la lettre d'intention pendant la période de crise ou d'insolvabilité de la KG et était par conséquent tenue des dettes de la KG échues postérieurement à la rupture de la lettre d'intention aux termes de celle-ci. Le pourvoi en cassation formé contre cette décision conduit au renvoi de l'affaire devant la Cour d'appel.
La Cour d'appel n'a pas considéré les arguments de poids de la défenderesse selon lesquels les parties à la lettre de confort auraient convenu qu'un tel accord permettait uniquement d'éviter une demande d'ouverture de procédure collective, des mesures de redressement étant prises à cette date.
Il était prévu d'éviter l'ouverture d'une procédure collective seulement si le redressement de la société était possible. La défenderesse disposait par conséquent d'un droit de résiliation en cas d'échec des mesures de redressement. La rupture de la lettre d'intention prononcée le 11.11.2002 en vertu de ce droit savère valable. Le principe du droit de fournir des prestations à la place des fonds propres ne s'applique pas à la présente affaire. Il en ressort en effet uniquement une interdiction d'annulation.
La défenderesse n'a cependant pas fourni de prestations en guise d'apports au capital social qu'elle aurait ensuite annulées. Il n'est pas non plus interdit de rompre la lettre de confort selon le principe du crédit de financement. Un crédit de financement correspond à l'engagement des parties d'accorder à la société un prêt similaire à un apport ne pouvant être rétracté en cas de détérioration de la situation financière.
Information pratique : la lettre de confort a permis dans le présent cas de retarder l'endettement et la demande d'ouverture de procédure collective. Pendant toute la durée de la convention, la défenderesse était en effet tenue des dettes de la société dont le paiement était arrivé à échéance, cette obligation n'ayant pas été supprimée rétroactivement au moment de la rupture de la lettre d'intention. Il est à préciser que le litige porte uniquement sur les dettes échues postérieurement à la rupture de la lettre d'intention. Sur ce point, la Cour de cassation allemande refuse de faire droit à l'action en dommages-intérêts intentée initialement.
BGH (Cour de cassation allemande), arrêt du 20.9.2010 - II ZR 296/08
21.12.2010